Jusqu’au 16 janvier 2023, le Centre Pompidou propose une rétrospective des œuvres et de l’engagement politique d’Alice Neel, artiste nord-américaine du XXème siècle. L’occasion de revenir un peu sur qui elle était, ses œuvres et ce qui fait sa singularité.
Alice Neel est une artiste américaine du XXème siècle. Spécialiste du portrait et aimant le réalisme, elle a consacré sa carrière à immortaliser les marginaux, les personnes écartées de la société américaine en raison de leurs origines, couleur de peau, excentricité, orientation sexuelle ou leur engagement politique. Elle même engagée à cause, elle peint alors “des êtres abîmés par le capitalisme et qu’elle n’enjolive pas, mais sur lesquels elle jette un regard plein d’empathie« , comme l’explique Angela Lampe, commissaire de l’exposition du Centre Pompidou.
Avec ses portraits, Alice Neel propose aussi un nouveau regard sur la société, différent du regard masculin habituellement représenté dans les portraits.
“Cézanne disait : “J’aime peindre les gens qui ont vieilli naturellement dans le pays”. Et je dis que j’aime peindre des gens qui ont été déchiquetés par la race de rat à New York”
Alice Neel
Très vite, Alice Neel s’intéresse aux femmes et à leur représentation dans la société. En 1931, alors qu’elle est en dépression après le départ de son mari et la mort de sa fille, elle dresse le portrait de deux amies à elle, Ethel Ashton et Rhoda Meyers. Ces portraits sont loin de correspondre aux représentation stéréotypes de la femme. Les corps ne sont pas faits pour plaire, ils sont déformés et mettent les spectateurs mal à l’aise. Les femmes sont présentées comme des figures hésitantes et disgracieuses.
À propos du portrait d’Ethel Ashton, Alice Neel a déclaré des années plus tard : “Vous voyez, c’est sans compromis. Je peux vous assurer qu’il n’y avait personne dans le pays qui faisait des nus comme ça. C’est aussi super pour le Mouvement de Libération des Femmes, parce que [la femme représentée] s’excuse presque d’avoir vécu.” Le portrait en lui-même offre une nouvelle vision radicale et puissante de la féminité.
Tout au long de sa carrière, Alice Neel continue de s’engager en faveur de la cause des femmes et des minorités, en continuant de leur offrir de nouvelles représentations. Elle s’inspire alors des personnes de son entourage et réalise des portraits très réalistes des habitants de son quartier, des femmes enceintes et des femmes victimes de violences conjugales. Devenue une icône du féminisme militant et dans une approche intersectionnelle, elle lie la lutte pour la cause des femmes à la lutte contre la discrimination de classe et d’origine.
“J’ai toujours pensé que les femmes devaient s’indigner et cesser d’accepter les insultes gratuites que les hommes leur infligent.”
Alice Neel, 1971